Gomorra c'est avant tout une affiche: une image d'un gamin au sourire torve, exalté et effrayé de sa mitraillette qu'il pointe sur l'horizon. Les muscles tendus, le corps décharné, pataugeant en slip dans un marécage boueux, le crane rasé, devant l'autre, le vrai caïd, déjà adulte, la posture adipeuse, le sourire clair, l'arme droite, la jambe sûre, du vrai truand habitué à la guerre, aux gangs, à tuer. Ensuite, derrière, il n'y à que l'horizon nu, inhumain, froid, marécage immense qui les entoure, les dépasse, et va les engloutir à jamais non pas dans la terre comme des hommes, mais dans l'enfer de la fange dans laquelle ils ont creusé leur propre tombe. Trois étapes, donc, du nourrisson innocent qui naît autour des mafieux, le devient pour finalement en mourir sans gloire ni honneur. Tel est le programme que nous propose Matteo Garonne avant même l'entrée dans la salle.
On croit voir un documentaire plutôt qu'un film : il n'y a aucun héros dans le scénario. Tout le monde est pourri, tout le monde veut se faire sa place, personne n'ose parler, on ne peut faire confiance à personne, et chacun pour soi au final.
Les personnages sont enfermés dans un système qu'ils ne contrôlent plus, et que plus personne ne controle, où finalement chacun décide pour soi, et pour les autres de la vie de tous. Garonne parle de la destruction des structures : familiales, sociales, de gangs, étatiques, commerciales, d'amitiés...
On assiste à la métamorphose du fils modèle de 9 ans qui commençant par livrer des courses à la mère de son copain, fini par dealer de la drogue puis aider à son assassinat. L'immeuble de quartier se divise en deux clans qui s'entre-tue entre frères et amis d'enfances. Les sous-fifres des gangs décident sans les chefs. La police est quasi absente. Les relations de business se réduisent à des sourires aimables, et l'échange de papiers entre cols blancs, sans aucune vérifications adéquates. Les vieilles relations de familles s'effacent contre la nécessité de "marquer des points et gagner du fric".
Face a cette décomposition du monde des valeurs, les personnages réagissent comme ils peuvent, mais avant tout pour eux-mêmes, et après eux, le déluge, dans une hypocrisie sans honte : que ce soit la fameuse scène de rejet des pêches ou les irrémédiables dégâts sur l'environnement dus a l'enfouissement dans le sol de déchets toxiques non traites, le respect des familles ou de la nature et piétine au profit du confort matériel et de la profitabilité économique a court terme. Les vrais acteurs sont ici : l'hypnotique puissance de l'argent et le mirage du confort matériel. Matteo Garonne propose ces scènes en italie comme les symptôme d'un mal rampant plus global, qu'est le respect et la pollution de nos ressources naturelles. Proposer cette vision dans un pays européen industrialise est d'un pessisme glacial.
C'est un monde drogue, rageur, épileptique, une zone de non droit où éclate une guerre des gangs de plus que décrit Gomorra. Personne n'y échappe et dans notre fauteuil parisien on se dit qu'il y a encore des zones d'ombres dans notre europe-première-puissance-commerciale-au-monde. Un appel a un état de droit (la police est quasi absente de tout le film) qu'un film comme Il Divo ne nous donne pas beaucoup d'espoir de voir apparaître bientôt...
L'italie s'auptosie [ Gomorra ]
Subscribe to:
Post Comments (Atom)
No comments:
Post a Comment